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Climat, santé, et qualité de vie : le verdissement des municipalités comme solution

19 septembre 2025

6 minutes de lecture

Cet article a été rédigé par

  • François Grenier

Regardez le webinaire Climat, santé, et qualité de vie : le verdissement des municipalités comme solution en différé 

Le verdissement et son impact sur la qualité de vie

C’est clair. C’est démontré. Sur le plan populationnel. Les quartiers dotés d’une bonne couverture végétale, comparés à des quartiers limitrophes dont la canopée est insuffisante, sont associés à une diminution des taux de mortalité de 8 à 12 %. On constate ainsi moins de décès liés aux maladies cardiaques, au diabète, aux maladies pulmonaires et aux accidents vasculaires cérébraux. C’est attribuable au fait que les arbres contribuent à assainir l’air, mais aussi que leur présence encourage l’adoption d’un mode de vie plus actif.

D’autre part, sur le plan de la santé mentale, on peut démontrer qu’une simple balade dans un parc boisé diminue significativement le stress. En effet, le contact fréquent avec la nature atténue l’anxiété, la dépression, et accroît la perception de bien-être et de bonne santé. Chez les enfants, par exemple, on note une amélioration des performances scolaires, des capacités de concentration, d’apprentissage et de consolidation de l’information.

Tous ces bienfaits sur la santé physique et mentale sont malheureusement sous-estimés. Même si on peut les chiffrer. Car chaque dollar investi en verdissement urbain rapporte des bénéfices sociosanitaires qui vont de 3 à 15 dollars. Un rapport coûts-bénéfices des plus avantageux !

 À cela s’ajoute la dimension sociale, puisque les projets de verdissement conduisent souvent à la création d’espaces de socialisation. Parcs, espaces verts, jardins collectifs sont des lieux propices pour tisser des liens sociaux, qui, eux aussi, comptent en tant que facteurs de santé globale. Ainsi, les retombées des programmes de ruelles vertes vont bien au-delà de leur seul verdissement. Car, pour aménager une ruelle verte, il faut collaborer, échanger, travailler avec le voisinage, ce qui conduit à la création d’une sorte de filet social à échelle micro-locale.

Le bon arbre au bon endroit

L’Organisation mondiale de la santé recommande aux municipalités de suivre la règle 3-30-300. Le chiffre 3 correspond au nombre minimal d’arbres que l’on devrait voir de sa fenêtre, tandis que 30 représente le pourcentage de canopée qu’il faut offrir dans chaque quartier, et 300 le nombre de mètres qui devrait, au maximum, séparer les ménages d’un parc.

Ça, c’est le but. Mais avant d’y parvenir, il faut réaliser que planter des arbres, ça demande de l’espace, du temps, de l’argent et des ressources. Il faut savoir aussi que les actions de verdissement engendrent des retombées variables en fonction des contextes sociodémographiques et des caractéristiques géomorphologiques des milieux. Afin d’en optimiser les impacts, il est préférable de privilégier des approches structurantes. D’établir des grilles de priorisation afin de s’assurer d’intervenir là où les déficits nature se font le plus cruellement sentir. Et planifier ces interventions tout en étant conscients des impacts du changement climatique. En sélectionnant, par exemple, des espèces plus susceptibles de résister à l’augmentation des températures, des sécheresses et des phénomènes météorologiques violents.

Les défis et les obstacles du verdissement

Les villes doivent actuellement composer avec des crises multiples : crise de l’habitation, crise climatique, crise de la biodiversité. Et tout ça à l’intérieur d’espaces limités. Ce qui les oblige à faire des choix. Mais, au moment de décider, il faut surtout éviter de sacrifier des espaces naturels pour la construction de logements. On ne devrait jamais opposer la protection de l’environnement et le développement. Les municipalités ont d’abord intérêt à requalifier les espaces existants, qui sont souvent beaucoup trop minéralisés. Par exemple, les friches industrielles, qui peuvent accueillir de nouveaux logements, mais en pensant aussi au verdissement de ces futurs milieux de vie.

On revient ici au principe de la grille de priorisation. Il est important de bien planifier les projets afin d’assurer la cohabitation de ces deux objectifs - logement et environnement - pour qu’ils puissent se renforcer mutuellement. Et cette planification doit aussi tenir compte de l’entretien. Car, pour certaines infrastructures naturelles, l’entretien est essentiel à leur bon fonctionnement. Par exemple, dans le cas de la gestion des eaux pluviales avec des infrastructures naturelles drainantes, on doit non seulement s’assurer d’avoir les capacités de les implanter, mais aussi les moyens de les faire vivre, de bien les faire fonctionner à long terme.

Enfin, l’un des défis qu’il ne faut pas sous-estimer, c’est la résistance de certains citoyens. À Varennes, sur les quelques 8 000 maisons unifamiliales que compte la municipalité, encore 700 d’entre elles n’ont pas un seul arbre sur leur terrain de façade : malgré un règlement municipal qui, depuis trois ans, exige d’en planter au moins un. La Ville n’aura-t-elle d’autre choix que d’imposer des amendes dont les revenus, bien sûr, serviront à planter d’autres arbres sur les terrains publics ?

 

Comment rallier les partenaires et la population à des projets de verdissement ?

La communication, c’est le nerf de la guerre. Il est essentiel de bien expliquer les raisons qui sous-tendent les actions menées sur le terrain. Qu’il s’agisse d’ailleurs de verdissement ou de tout autre type de projet. Et l’une des meilleures stratégies, c’est de montrer l’exemple. Un maire qui participe à une corvée de plantation d’arbres, avec des citoyens bénévoles, avec les élèves d’une école, et dont les images circulent dans les médias locaux et sociaux, c’est porteur de changement. Ça sensibilise. Tout comme un arbre qui pousse bien, porte fruit.

Il est donc essentiel d’ouvrir le dialogue avec la population. Mais avant toute consultation publique, il est d’abord nécessaire de s’appuyer sur des analyses urbanistiques et sociosanitaires. Il faut par exemple impliquer la santé publique en amont des projets afin d’en évaluer les impacts à travers le prisme de la réduction des inégalités sociales. Ensuite, une fois que les objectifs sont clairement définis, dans une véritable perspective d’équité, on implique les communautés concernées dans la conception, l’idéation, et même le déploiement des mesures de verdissement. Ce qui permet aux personnes de s’approprier le projet, de se sentir solidaires de l’initiative.

Les projets de verdissement doivent être vus comme des investissements, qui vont rapporter des bénéfices. Mais on ne peut pas les tenir pour acquis. La nature, à elle seule, ne peut garantir ces investissements. Il faut veiller à les optimiser. Faire en sorte qu’ils s’intègrent organiquement dans la communauté. Et qu’ils servent à plus d’une fin. Il ne suffit pas de planter des arbres pour lutter contre des îlots de chaleur. Il faut aussi penser l’espace pour qu’il devienne un lieu de socialisation, un espace qui renforce le sentiment d’appartenance à la communauté.

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